Dépoussiérage en règle

[HRP : Suite de CA]

Lac DE Cristal, lac DU Cristal, qu'importe, le système de repérage de Kiefer faisait assez bien son travail pour ne pas se soucier de l'article, et ils se matérialisèrent en douceur sur les rives du lac. La sensation de froid disparaissait peu à peu, laissant le soleil de la matinée réchauffer leur peau.

Alors qu’ils avaient quitté la tour de nuit, voilà que Clotilde et son génie émergeaient de l’obscurité pour atterrir ici. Kiefer avait choisi de les faire arriver de jour, tout simplement pour apprécier le décorum, et puis parcequ’il n’avait de toute façon pas sommeil. Pour eux, le trajet avait duré 10 secondes. Et pourtant… Bah, surtout qu’elle ne demande pas d’explications, il n’avait pas envie de se lancer dans une revue des bases de la mécanique quantique.

L’eau était claire et calme, la berge en pente douce, juste assez pour servir de transat naturel. Au loin brillait le dit cristal, et Kiefer en conclut que le type qui avait trouvé le nom n’avait au final pas vraiment une imagination si pourrie. Oui, on était obligés de voir la pierre, c’était un fait.

« Satisfaite ? »

Kiefer ne laissa pas le temps à Clotilde de réponse, s’étirant aussi fort qu’il le pouvait, afin de détendre ses muscles qui étaient décidemment assez raides ces derniers temps. Le soleil. A voir son teint cuivré, on pouvait deviner que le génie appréciait l’astre et son rayonnement, même si la nuit était plus propice à ses jeux habituels.

« Tu vois, il ne s’est rien passé de fâcheux… Alors quel est le programme maintenant ? »

Oui, que voulait elle faire en venant ici ? Prendre un bain ? Chouette, le spectacle intéressait le génie d’avance…

Clotilde n'était pas déçue. Kiefer avait bien fait les choses. On pouvait bien entendu se demander comment il s'était débrouillé pour les faire arriver de jour alors qu'ils étaient partis de nuit. Mais bon, c'était très secondaire et somme toute plutôt heureux. La plage la nuit, ça manque cruellement d'intérêt. Elle s'intéressa un peu à son environnement: le ciel était bleu, le lac... cristallin et le sable semblait doux et tiède.

Elle retira ses chaussures et glissa ses orteils dans le sable, qui était effectivement doux et tiède. Elle se tourna vers Kiefer.

"Pas mal du tout."

Elle avait beaucoup entendu parler de ce lac, mais en vérité, n'y était jamais allée. Elle avait vu de nombreux tableaux et écouté de nombreux récits qui en parlaient, mais en vrai, le lac dépassait ses espérances.

"Le programme? Eh bien je suppose qu'il serait absurde de se priver d'une si jolie baignoire, non?"

Avec une habileté qui témoignait d'une longue habitude, Cloltilde déboutonna rapidement le dos de sa robe et le tissu glissa le long de son corps. Elle se pencha, ramassa le vêtement, le posa par dessus les chaussures abandonnées précédemment. Puis, en sous vêtements, elle s'avança dans l'eau.

A cette heure matinale, l'eau aurait du être fraîche, voire glaciale. Et en pratique, elle était fraîche, voire glaciale! Clotilde faillit ressortir précipitamment, mais l'envie de se baigner était plus forte que le froid. Si elle s'avouait vaincue maintenant, elle n'y retournerait pas, et ça serait fort dommage. Courageusement, elle continua à marcher sur le fond sablonneux, jusqu'à ce que l'eau lui arrive aux épaules. Ses cheveux flottaient autour d'elle comme une auréole noire et ondoyante.

Elle se réchauffait doucement, en s'habituant à la température de l'eau, pendant que le soleil chauffait lentement sa peau. La plage, les lacs, c'était vraiment quelque chose d'agréable. Si elle avait eu la chance d'avoir une queue de poisson, elle n'aurait jamais mis un pied (une nageoire, plutôt^^) hors de l'eau...

Kiefer avait des yeux de chats, et de fait, il avait un goût mitigé concernant l'eau. Les douches, les bains, l'eau chaude, ça allait très bien, mieux, il aimait s’y prélasser, mais le plaisir de se baigner dans de l'eau glacée... En plus dans un lac où on voyait pas le fond, ça lui semblait plutôt incongru. Et puis l'eau froide frustrait son physique de mâle, ce que le génie narcissique n'appréciait pas tellement.

Clotilde, quand à elle n'avait pas l'air gênée par la température certainement basse (ça raffermit, ouais). Et le coin semblait lui plaire. Après avoir essayé le sable, la voilà qui lorgnait l'étendue liquide avec envie. Se débarrassant sans remord de sa robe poussiéreuse (au grand plaisir du génie), elle s'approchait maintenant de la berge (au grand déplaisir du génie).

Les pieds, les chevilles, les mollets, les genoux... on voyait bien que Clotilde était déjà transie, mais elle s'obstinait, et Kiefer en eut un frisson à imaginer la température et les picotements qui devaient assaillir ses jambes, donnant l'impression que quelqu'un les serrait dans un étau. Le ventre (aie aie aie), la taille, la poitrine et les épaules (*couic*), bientôt seule sa tête émergeait. C'était doublement frustrant : Kiefer ne pouvait même plus profiter du spectacle.

Encore sur la berge, le génie faisait des manières. Il avait enlevé ses bottes (lui aussi aimait marcher pieds nus dans le sable), et s’était aussi débarrassé de sa chemise, afin de laisser les rayons du soleil le réchauffer. Il avait déposé le tout un peu plus loin, mais arrivé au bord de l'eau, il osait à peine se mouiller les doigts de pieds, les ressortant immédiatement avec un air de félin effarouché.

En y réfléchissant bien, il se demandait s’il n’y avait pas un moyen pour réchauffer ce ojpsljhfb de lac, mais ce serait une dépense d’énergie énorme pour rien. Pourquoi ne les avait il pas fait arriver en après-midi ? Au moins il y aurait quelques degrés de plus près du bord.

Plongeant ses mains dans ses poches de pantalon (il l’avait conservé pour des raisons évidents de respect des mœurs de base), il se contentait de regarder, espérant fortement (et peut être aussi un peu en vain, à voir) que Clotilde ne profiterait pas de sa capacité à faire des voeux pour lui faire une sale blague. De ce côté là de la barrière, il avait fort peu d'humour. Et puis tant pis s'il était couvert de poussière!

[HRP : XD]

[HRP 2 : Constructif comme HRP, hein?]

D'où elle était, Clotilde regardait Kiefer sur la berge, qui posait un orteil dans le lac et l'en retirait précipitamment comme si l'eau l'avait mordu. Alors comme ça il n'aimait pas l'eau... Si elle s'éloignait encore plus du bord et qu'ele ouvrait la bague qui pendait à son cou, était-il obligé de la rejoindre? Ou est-ce qu'il préfèrerait désobéir?

Elle se rapprocha du bord. Le lac descendait rapidement au début, et à moins de deux mètres de la berge, elle avait encore de l'eau jusqu'à la taille. Elle avança encore de quelques pas, suffisamment pour projeter de l'eau sur son génie du bout du pied.

"Monsieur n'aime pas l'eau?"

Elle avait de l'eau jusqu'au genoux et regardait Kiefer en souriant, les mains sur les hanches.

"Tu sais, je pourrais faire quelque chose de très très méchant. Surtout que je ne suis pas quelqu'un de spécialement aimable et conciliant. Je pourrais te forcer à entrer dans l'eau. Ca n'est qu'un exemple, bien entendu. Et crois-moi, je ferais attention à la formulation de mon voeu. Pour être sûre que tu n'esquives pas"

Elle hésitait un peu à mettre cette menace à exécution. Ca serait surement très divertissant, mais Kiefer ne le lui pardonnerait jamais. En soi, ça ne la gênait pas tant que ça, mais elle craignait le retour de baton. Il avait prouvé qu'il n'hésitait pas à utiliser ses pouvoirs même quand elle n'avait rien dit... Il valait mieux se contenter de lui faire un peu peur. C'était plus prudent.

Elle ressortit de l'eau. Il fallait soi se mouiller entièrement, soi sortir. Rester à moitié immergée était le meilleur moyen d'attraper une maladie désagréable et fréquemment contagieuse. Elle attrapa la chemise de Kiefer qui trainait par terre, et qui, fait injuste, était moins sale que sa robe, et l'enfila rapidement. Elle ne la ferma pas, ainsi on voyait bien qu'elle faisait quelques tailles de moins. En fait, le vêtement lui arrivait à mi-cuisse et ses mains avaient disparu dans les manches. Mais le tissu était agréable, et tiédi par le soleil juste à point.

"T'es pas marrant hein. Pourquoi il a fallu que je tombe sur un génie aquaphobe? En plus, y a pas de raison. Tu aurais peur de te baigner dans de la lave en fusion, je comprendrais, mais là..."

Elle soupira d'un air agacé. D'accord l'eau était glaciale. D'accord ses doigts étaient encore bleuis par le froid. Mais c'était pas non plus la banquise. Et puis lui qui aimait faire son malin...

Kiefer regardait, sur la terre ferme, Clotilde qui se rapprochait du bord avec un haussement de sourcil suspicieux. Allait elle jouer des cow-girls? Elle était assez proche de lui et avait encore une bonne partie des jambes dans l'eau, confortant le génie sur son choix de rester sec.

"Hey!"

Suivie d'un juron, Kiefer avait poussé cette exclamation alors qu'il reculait d'un bond, tentant d'éviter l'eau envoyée par Clotilde. C'était puéril, et tout à fait digne de lui, mais que ce soit fait par quelqu'un d'autre ne l'amusait pas vraiment. Finalement c'est surtout son pantalon qui prit, mais ce n'était pas si grave, ça serait vite sec. Ce n'était pas comme s'il était totalement trempé!

Le génie fusilla quand même la jeune femme du regard, en secouant la toile noire humide. Il marmonnait quelquechose que sa maîtresse serait certainement ravie de ne pas entendre. Quand à sa menace... Oh, sur le moment c'était certain qu'il n'apprécierait pas, mais qu'elle ose. Ca prouverait qu'elle n'avait pas la notion des représailles qu'il pouvait mettre en place. Ah si... La voilà qui sortait. Peut être un relent providentiel de jugeotte qui lui avait fait comprendre de ne pas sous estimer celui qui n'était pas vraiment un serviteur dévoué.

Quoi, que... Elle pouvait encore faire l'idiote. Désobéir or not to désobéir... Et la voilà qui mettait SES affaires... Bon, ce n'était pas si grave ça, après réflexion, une jeune fille, mouillée, en sous vêtements dans sa chemise... Aussi obtue soit-elle, l'instinct de mâle de Kiefer reprit le dessus sur sa notion de propriété et il la laissa s'approprier le vêtement.

Alors qu'elle recommençait à parler, Kiefer se décida à gueuler un bon coup. Comme ça, pour rien. Enfin si, pour parler... un peu fort...

"Je ne suis pas aquaphobe! Je ne supporte pas le froid! C'est pourtant pas dur à comprendre! Je viens d'un monde où c'est l'été toute l'année..."

*Oh et puis pourquoi j'me justifie....*

"et laisse tomber, je n'ai pas besoin de te donner plus d'explications."

Alors, avait elle encore un truc à dire, un souhait à faire? Elle avait intérêt, lui était prêt à partir là pour aller voir ailleurs si il y était, torse poil ou pas. Peut être même qu'il ferrait la sourde oreille si elle se mettait à ouvrir la bague... Il se rapprocha de ses affaires, enfin, de ce qu'il en restait, frôlant Clotilde qui était sur son chemin. Puis d'un air décidé, il se laissa tomber à terre pour remettre ses bottes ferrées...

Clotilde fut un peu surprise de la réaction de Kiefer. Alors comme ça elle avait réussi à le mettre de mauvaise humeur? Intéressant. Ainsi, ce qu'il ne supportait pas, c'était qu'on porte atteinte à son ego. Pas étonnant, en y réfléchissant bien. Une attaque physique ne le gênait pas, de toute façon il était plus fort qu'elle. Au petit jeu de "c'est-toi-qui-va-craquer-avant-moi", il ne se débrouillait pas mal non plus. Mais mettre le doigt sur ses faiblesses et appuyer dessus, ça, ça ne lui plaisait pas.

Enfin pour l'instant, ça n'était pas le problème. Elle l'avait vexé et bizarrement, elle avait quelques remords. Oh pas de quoi ramper par terre, mais quand même un peu. Il était attachant finalement. Malgré son caractère et ses manières insupportables.

Elle se laissa tomber dans le sable à ses côtés.

"C'est pas grave hein. Je me baignerai un autre jour. Fais pas la gueule, quoi..."

Elle lui attrapa le poignet de ses doigts encore glacés par son séjour dans le lac. S'il partait maintenant, sa fierté lui interdirait de rouvrir la bague pour le rappeler. Et elle ne le rappellerait surement pas avant longtemps. Même si elle avait besoin de lui. Par contre, s'il partait maintenant, elle serait de mauvaise humeur un bon bout de temps.

"D'ailleurs si tu restes, j'ai un truc à te demander."

Il fallait espérer qu'il serait suffisamment curieux pour que ça le convainque de rester. Ca pouvait marcher. Sur Clotilde, en tout cas, ça aurait fonctionné à merveille. Et puis elle avait vraiment quelque chose à demander. Cette histoire de lire dans les pensées ne lui était toujours pas sortie de la tête...

Mais comment être sûre qu'il ne parte pas? Il était capital qu'il ne s'en aille pas comme ça. Elle avait un sens de l'orientation si peu développé qu'elle ne retrouverait jamais le chemin de chez elle. Et en plus, elle n'avait aucune arme si jamais elle se faisait attaquer en route...

"En fait, je préfèrerais vraiment que tu restes. Tu as le droit de négocier ta présence, si ça te chante"

Savoir négocier était toujours un atout précieux. Je vous laisse ce chandelier si vous promettez de ne pas avertir la police. Je reste, mais je prends le grand lit. Je pars mais pas sans le coffret que vous cachez derrière votre dos. Ca permettait d'obtenir ce que l'on voulait, quitte à consentir à un petit sacrifice. Enfin, il fallait quand même que ça vaille le coup, évidemment.

Elle n'avait pas laché le poignet de son génie attitré. A son contact, ses doigts s'étaient réchauffés rapidement et sa peau reprenait son comportement habituel lorsqu'elle s'exposait au soleil: elle redevenait brulante. Bientôt, on pourrait presque faire des oeufs au plat sur ses jambes nues. Presque.

Kiefer finissait de lacer ses chaussures quand Clotilde s’interposa entre lui et sa sortie théâtrale. Oh oui, il savait pourquoi elle le retenait : parceque sinon elle était seule, sans armes, au milieu de nulle part, sans vivres… et parceque ça la faisait sans doute prodigieusement chier de le laisser faire ce dont il avait envie. Les femmes, ça croit toujours que c’est votre mère…

Sorti de cette réflexion oh combien machiste, le génie se permit de remarquer qu’elle avait en fait l’air plutôt… désolée. Tiens, trouverait elle attachant celui qui comptait bien se faire connaître comme son bourreau mental attitré ? Syndrome de Stockholm ? Autant profiter de la brèche. Plus il aurait l'air blessé, plus elle serait concilliante... Peut être...

Levant le regard, Kiefer plissa les yeux, d’un air sceptique. Elle se laissa tomber à son tour et il ne fit rien pour se montrer de meilleure humeur. Pire : ça commençait à l’amuser alors il remettait une couche et fronça les sourcils. Incorrigible.

Ses doigts étaient glacés, et un frisson parcourut son bras quand elle les posa. Baissant les yeux sur les phalanges pâles, il l’écoutait parler, et demander à discuter. Quand elle parla de négociation, un sourire barra son visage et il redressa la tête, la fixant dans les yeux. Héhé, elle parlait trop vite.

« Tu devrais réfléchir avant de parler… Hum… que pourrais-je demander en échange… »

Tout de suite des idées… Graveleuses s’étaient imposées à son esprit, mais ce n’était peut être pas le moment pour ça, hein ^^’. Quoi d’autre ? En fait rien ne lui venait d’autre en tête… Quoi que…

« Oh, je négocie : je reste, je t’écoute, et en prime je te ramène ensuite dans un endroit moins paumé, en échange d’une nuit dans TON lit avec la personne de MON choix, ce qui veut dire qu’il ne s’agira peut être pas de toi… »

C’était assez tordu, mais c’était tout ce qu’il avait trouvé pour aller vite. Se penchant en arrière, le génie passa ses bras derrière sa tête, regardant le ciel. Qu’allait elle faire ? Accepter ? Refuser ? Surenchérir ? Ou alors ça lui était égal ? Bref, quoi qu’il en soit, il l’écouterait, il n’avait rien de plus intéressant à faire.

Tournant son regard qui mêlait fourberie et amusement sur le visage de Clotilde, il ne le fixa qu’un court instant, avant de laisser ses pupilles parcourir le reste de son corps sans se restreindre aux zones couvertes par le tissus.

Clotilde fronça les sourcils. Elle s'était doutée que Kiefer allait demander quelque chose dans ce genre. Juste pour voir jusqu'où il pouvait aller. Elle avait bien envie de donner son accord, pour lui montrer qu'elle était prête à faire le nécessaire pour obtenir ce qu'elle voulait. D'un autre côté, prêter son lit à son génie et à une parfaite inconnue, c'était moyen. Elle dormait où elle?

"Hmpf"

Réponse peu construite mais sans équivoque possible. Cette proposition ne l'amusait pas du tout. Kiefer pouvait s'envoyer en l'air avec qui il voulait, mais si possible loin de SA maison, et à plus forte raison, loin de SON lit. Et puis s'il choisissait une prostituée... Niveau hygiène, c'était plus que limite. Et elle n'avait pas envie de bruler les draps en soie blanche qu'elle venait tout juste d'acquérir et qui lui avait couté une fortune. Décidément, elle était riche depuis peu, et ce type faisait tout pour la ruiner. D'abord la robe, après, peut-être, les draps...

Elle lacha le bras de Kiefer, laissant la marque de ses doigts, qui s'estompait progressivement, sur la peau dorée du génie et lui jeta un rapide regard. Apparemment il ne manifestait plus vraiment l'envie de partir. Il préférait rester là à l'écouter et à la reluquer en sous vêtements. Elle resserra les pans de la chemise autour de son corps.

"Oh j't'en prie ne me regarde pas comme ça. Tu me complexes. Et pour en revenir à ta proposition, il n'est pas question que je prête mon lit à une inconnue. Tu peux dormir dedans si tu veux, mais pas faire n'importe quoi avec des gens que je ne connais pas. Ou alors tu prends un autre lit."

Allait-il être d'accord? Proposer autre chose? De toute façon, elle en était presque sûre, il ne partirait plus tant qu'il ne saurait pas ce qu'elle voulait lui demander. Elle allait faire durer, pour le plaisir de voir jusqu'à quand il tiendrait avant de lui poser ouvertement la question. Têtu comme il était, ça pouvait prendre un moment. Mais il finirait par demander, c'était certain.

Pour l'instant, le problème était de savoir s'il allait accepter ses conditions. Il y avait trois possibilités: soit il acceptait de prendre un autre lit, soit il choisissait quelqu'un qu'elle connaissait (les possibilités étaient d'ailleurs fort réduites. Les amis de Clotilde se comptait sur les doigts d'une main. Voire un peu moins), soit il changeait complètement d'idée. Il y avait bien aussi une dernière éventualité, assez proche de la seconde, mais qu'elle se refusait à envisager.

En attendant la réponse, elle glissa ses orteils dans le sable et se plongea dans la contemplation du sable qui glissait sur les côtés de ses pieds dès qu'elle les soulevait du sol. Ses cheveux séchaient doucement en bouclant. Bientôt elle aurait de jolies boucles partout sur la tête, et elle mettrait une bonne demi heure à les démêler et à leur rendre leur légère ondulation initiale. Kiefer n'avait certainement pas ce problème... Une injustice de plus à ajouter à une liste déjà longue...

Le Hmpf peu enthousiaste ravit Kiefer certainement beaucoup plus que Clotilde ne l’envisageait. Il avait visé juste. Il ne savait pas vraiment encore quelle partie de la phrase avait fait mal, mais sa propriétaire semblait hermétiquement réfractaire à la proposition. Comme c’était étonnant ! *ironique*

Le génie regarda Clotilde retirer sa main, non sans laisser des traces claires sur sa peau. Elle avait serré tant que ça ? Le regard de la jeune femme, furtif mais sans équivoque, transpirait la contrariété et la réflexion. Et puis cette façon qu’elle avait eu de cacher son corps prouvait encore un peu mieux que la gène et la distance reprenaient leurs droits dans leur relation ‘professionnelle’ toute jeune.

*Je la complexe ? Ah…*

Kiefer se targuait d’être un fin amateur de chair féminine, et il pouvait avoir sans aucun besoin de recours à aucune forme de torture que la demoiselle n’avait pas de quoi être complexée. Mais c’était peut être une façon à elle de parler. Quoi qu’il en soit il avait plus sérieux en tête que lui envoyer des fleurs.

Son sourire agaçant s’étendit sur le côté et il se tourna sur le côté, posant sa tête sur une de ses mains, un genoux plié, la position du touriste en vacances.

« Ok, je marche. »

C’était étonnant, il ne cherchait pas à négocier ? En effet, c’était inutile. En tant que pinailleur de première, le génie savait analyser et détourner les mots d’une phrase pour en faire ce qu’il voulait. Et il avait une terrible mémoire. Le plan qui germait dans sa tête : présenter une quelconque beauté (on a bon goût ou on l’a pas, mais la beauté était un minimum) à Clotilde, voire les faire se rencontrer par ‘hasard’, et hop, ce n’était plus une inconnue. Bien entendu, il choisirait justement LE jour/soir qui l’amènerait à entrer juste à ce moment là dans sa chambre… Rien que pour voir sa mine déconfite ! ^^

« Et je vais même t’avouer que j’ai une excellente mémoire, je n’oublierai pas. »

Et si vraiment la situation se corsait, ils ferraient ça sur un lit de camp, mais dans sa chambre et tous les trois enfermés à l’intérieur… Bref, il se débrouillerait, mais ne comptait pas laisser passer l’occasion de jouer le troublion.

« Alors de quoi voulais-tu parler ? »

Kiefer posa sa main libre (celle qui ne soutenait pas sa tête) sur le sable, y traçant les contours d’un dessin inventé au fur et à mesure, et qui au final n’avait de sens que si on la regardait se son côté. Balayant son croquis d’un revers de la main (toujours la même XD), il saisit ensuite une poignée de sable et la balança sur les pieds de Clotilde qui venaient à peine d’émerger de leur cachette souterraine.

Kiefer avait accepté sans discuter. Ca n'était peut-être pas si bon signe que ça. Elle voyait venir le coup tordu. Mais il n'avait fait qu'accepter ses conditions. Elle n'était donc pas en position de contester. Il eut été ridicule de revenir subitement sur sa décision. Kiefer se serait sans aucun doute moqué d'elle.

Pourtant la solution ne lui convenait pas. Avait-il accepté de prendre un autre lit, ou de choisir quelqu'un qu'elle connaissait? Dans les deux cas, il interprèterait certainement à sa façon les tenants et aboutissants du contrat.

Elle sourit. C'était plutôt un rictus. Son pauvre cerveau avait du mal à suivre tous ces revirements de situation. Il faudrait bien qu'il s'adapte. Parler à Kiefer était une sorte de combat permanent et latent, où la moindre erreur était fatale.

"Je n'oublierai pas que tu n'oublieras pas. Pense aussi à te rappeler que c'est moi qui fait les voeux, et que si le jour venu je change d'avis, tu ne pourras qu'obéir..."

Et elle n'hésiterait pas une seconde. Si la greluche qu'il ramenait était moche, stupide, vulgaire ou malpropre, elle la ferait sortir de chez elle sans un regret. Et tant pis s'il le prenait mal.

Elle secoua ses pieds pour les débarasser du sable que Kiefer venait de lui lancer. C'était un peu stupide comme réaction. Mais ça détendait. C'était son côté enfantin qui la faisait parfois réagir de manière puérile. Elle retourna cacher ses orteils dans le sable chaud en cachant un petit sourire d'enfant pris en faute et se laissa basculer sur le dos, les jambes à demi repliées.

Elle contempla le plafond de ciel bleu un moment avant de répondre au génie. Elle avait vu juste. Il n'avait pas tenu bien longtemps avant de demander ce qu'était sa requête.

"Eh bien... Je veux apprendre à lire dans les esprits. Par souci d'égalité avec toi, tu vois. Parce que je me suis rendue compte que tu étais dans ma tête une fois, mais rien ne dit que je m'en rendrai compte une seconde fois. Si moi aussi je peux entrer dans ton esprit, je saurai tout de suite ce que tu penses, et si tu es entré par effraction dans ma tête ou non. Et dans l'ensemble, ça m'arrangerait bien de savoir faire. Tu pourrais m'apprendre?"

Elle n'avait peut-être pas présenté le problème de façon optimale. Mais elle n'avait pas non plus envie de mentir. Il valait mieux être honnête. Elle tourna la tête sur le côté pour voir le visage de Kiefer. Qu'allait-il en penser? Si ça se trouve, il était impossible d'apprendre. On savait ou on ne savait pas, et il était impossible de remédier à un tel état de fait. Dans ce cas, elle pourrait peut-être apprendre à cloisonner son esprit pour arrêter les intrus. Il fallait espérer.

Pour être plus à l'aise pour discuter elle se bascula sur le côté, soutenant sa tête de sa main, le coude posé dans le sable. De sa main libre, elle tira légèrement sur le bas de la chemise pour qu'elle lui couvre au moins le haut de la cuisse.

"Alors? C'est oui ou c'est non?"

S'il disait non, elle n'insisterait pas. Elle reviendrait à la charge plus tard, quand il ne s'y attendrait pas.

*Je n'oublierai pas non plus que tu n'oublieras pas que je n'oublierai pas. On va finir par plus s'en sortir là! ^^*

Clotilde avait parfois des réactions enfantines, et ce genre de choses n'émouvait pas Kiefer plus que ça, contrairement à d’autres qui trouvaient ça ‘mignon’. Le mot même ‘mignon’ était banni de son vocabulaire courant. En fait, il détestait les niaises qui jouaient les petites filles, heureusement que sa propriétaire n'en était pas là. C'était juste un relent d'enfance qui faisait valoir ses droits, rien de plus... La laissant parler sans l'interrompre, le génie écouta sa demande avec un froncement de sourcils. La lecture dans les pensées la préoccupait tant que ça?

Certains des arguments de Clotilde étaient fort valables, en effet, ça devait être assez frustrant de ne pas avoir les mêmes capacités de la personne en face de soi, surtout concernant ce genre de viol mental, mais Kiefer voyait comme un problème dans le plan de la jeune fille : jamais il ne lui laisserait faire ce que lui même se permettait avec d'autres. S'il avait dit qu'il ne lirait pas dans sa tête, ce n'était pour la laisser le faire sur lui. Encore heureux, il savait se protéger de ce genre d'intrusions.

"En résumé, tu me demandes de t'attribuer des pouvoirs magiques."

C'était une analyse plutôt courte de la situation, mais c'était bien cela.

"Hum..."

Caressant le coin de sa mâchoire dans une attitude de réflexion, Kiefer cherchait comment formuler une réponse qui contiendrait bien toutes les données nécessaire à la prise de décision de Clotilde.

"Alors oui, je peux te permettre de lire dans les pensées, c'est tout à fait possible. Sauf que ça ne marchera pas sur moi, vu que j'ai quand même maintenant l'habitude de ce pouvoir et que je sais comment monter des barrières quand l'envie m'en prend où en continu. Donc désolé, mais je te serais hermétique. Après, ça pourrait te servir sur d'autres, oui..."

Il fit une pause, le temps de trouver un galet à lancer sur ce wsrgser de piaf qui piaillait trop fort dans l'arbuste pas très loin.

¤PIOUH!¤

"Touché! J'en étais où? Ah oui. Donc je peux t'accorder ce pouvoir, mais pendant les premiers temps, quand tu ne sauras pas encore le maîtriser, tu risques d'entendre sans le vouloir et à haute voix toutes les pensées des gens des environs qui n'ont pas la capacité d'avoir de barrière mentale. Bref, prévoie l'aspirine, parceque ça ne doit pas être facile pour dormir..."

C'était clair? Oui, certainement. Pour ce qui était de lui apprendre à maîtriser tout ça, il pouvait le faire.

"Alors? Tu connais la formule si tu fais ton choix."

Au pied de l’arbre, l’oiseau à moitié assommé avait cherché à s’éloigner de la scène en sautillant. Arrivé à quelques mètres de là, une femelle renard lui avait sauté dessus, lui brisant le cou. L’oiseau finirait dans son estomac et dans celui de ses petits. La dure loi de la jungle : manger, être mangé…

Clotilde grinça des dents lorsque l'oiseau chanteur se prit un caillou dans le bec. Elle n'avait rien contre la violence en elle-même. En revanche, blesser des individus ou animaux qui n'étaient pas en position de se défendre l'horripilait. Particulièrement quand c'était un acte gratuit.

Elle n'écoutait que d'une oreille, obnubilée par l'oiseau qui se trainait péniblement à l'abri des arbres. A l'abri? Non. Un renard en fit son repas sans plus attendre.

Elle fusilla Kiefer du regard. Ca avait l'air de l'amuser en plus. Il était vraiment insupportable. Mais il était capable de lui fournir ce dont elle avait besoin, et c'était un argument de poids.

"Ok, c'est d'accord. Je souhaite pouvoir entrer dans les esprits et lire les pensées. Je souhaite aussi être capable de me protéger des intrusions mentales"

Elle se tut un court instant avant de reprendre.

"C'est formulé convenablement?"

Elle était prête à assumer des migraines quelques temps, mais ne tenait pas franchement à subir d'autres effets secondaires plus ou moins surréalistes parce qu'elle n'avait pas exposé son souhait correctement.

Elle le savait déjà, elle essaierait de pénétrer l'esprit du génie. Et elle essaierait jusqu'à ce qu'elle y arrive. Il y aurait forcément un moment où il ne penserait pas à se protéger...

Elle avait très envie de savoir ce qui pouvait bien se passer dans la tête de Kiefer. Jamais la jeune fille n'avait rencontré quelqu'un d'aussi complexe. Des fous, oui, elle en avait vu. Mais mêmes les pires d'entre eux ont une cohérence. Une cohérence qui n'est pas celle attendue par la société, mais on ne peut nier qu'ils suivent une logique personnelle. Kiefer, en revanche... Son esprit devait être un vrai labyrinthe... Et c'était teeeeeellement tentant d'aller y jeter un petit coup d'oeil...

Elle se demandait quand même à quoi aller ressembler son "apprentissage". Allait-elle devoir tout apprendre depuis le début. Ou est-ce que par un simple tour de passe-passe, elle se retrouverait à même d'entendre ce que pensait le voleur ivre du fond du bar qui lui faisait de l'oeil à chaque fois qu'elle mettait un pied dans la taverne? C'était peut-être douloureux...

Quoiqu'il en soit, elle n'allait pas changer d'avis maintenant.

Kiefer capta au dernier moment le regard méchant de Clotilde. Elle avait quoi? Qu'est ce qu'il avait fait, encore? L'oiseau? Bah, ce n'était rien ça. Le génie était décidemment bien tombé chez les voleurs : il n'avait aucun état d'âme, et causer la mort de ce petit animal bruyant ne lui laissait aucun remord. Et puis si on y réfléchissait bien, il avait peut être contribué à la survie d'un renardeau ou deux, et mine de rien il avait plus d'affinités pour les carnivores que pour les "piou pious". Soit.

"C'est d'accord? Bien!"

Un sourire radieux barra son visage. Mine de rien, Clotilde venait de s'enchaîner à lui pour une certaine période. Sans lui, elle risquait fortement de péter un boulon à cause des voix... Pas question de jeter la bague, et raison de plus pour être gentille avec son petit génie personnel. Bon, alors. Se redressant en position assise, Kiefer hésita pendant quelques secondes sur la conduite à tenir. Généralement il aimait bien toucher ses cibles pour ce genre de changement, rendant ce passage plus physique. Mais voilà, elle ne voulait pas qu'il la touche? Regardant ses mains et haussant les épaules, il décida de procéder sans crier gare.

Deux solutions s'offraient maintenant à lui. Soit il faisait monter le "volume" de l'écoute doucement, soit il faisait ça d'un coup. La première solution serait plus agréable pour Clotilde, mais avait de fortes chances de le lasser. La seconde était... certainement moins agréable, mais bien plus divertissante (si on peut se divertir de voir une personne souffrir. Et lui il pouvait). De toute façon les premières minutes ne seraient pas terribles, il n'y avait pas d'humanoïdes à portée ou de gros animal assez évolué pour avoir une réflexion qu'on pouvait entendre sans avoir à se concentrer. Allez, va pour la seconde.

Sans prévenir et même sans bouger, il exauça le souhait. Dans la même fraction de seconde, il relevait ses barrière, le rendant aussi bavard mentalement qu'un vase Ming. Si Clotilde tentait des assauts, elle s'écraserait sur un sorte de mur impénétrable. Le génie avait très bien enregistré la seconde partie du voeu, par contre ça il ne pouvait pas le lui faire avoir de façon innée. Il devrait lui apprendre à lever ses barrières petit à petit, une fois qu'elle aura déjà réussi à régler elle même son volume.

Ecoutant pour voir ce que la jeune femme pourrait bien ressentir, Kiefer tendit son esprit aux alentours, sans chercher à se focaliser sur une direction en particulier. Les petits animaux du coin n'émettaient pas grand chose, un vaste brouhaha de sentiments, de sensations, mais pas plus. C'était un bourdonnement assez entêtant, persistant, coloré, mais pas bien agressif. Tendant son esprit plus loin, peut être plus loin que Clotilde pouvait le faire pour le moment, il discerna dans les profondeur de l'eau des pensées bien plus cohérentes, certaines menaçantes, d'autres non. La distance servait de brouillage, mais le génie pouvait déjà sentir la présence d'être pensants, sous la surface.

"Raison de plus pour ne pas avoir mis le pied là dedans".

Ce murmure n'était dédié qu'à lui même. Maintenant il ferrait mieux de s'occuper d'elle, qui allait peut être être un peu déconcertée. Il plongea son regard dans ses yeux, mais se retint de pousser l'analyse de sa réaction qu'un simple regard. Il vérifia au passage la bonne mise en place de sa propre barrière constante : bien, rien ne filait.

Elle attendait qu'il fasse quelque chose. Elle s'attendait à une scène vaguement mystique, on se tient par les petits doigts et on fait tourner la table. Quelque chose dans le genre, en tout cas. Il ne bougeait pas.

Et puis d'un coup ses oreilles furent envahies par un bourdonnement. En fait, ça n'était pas vraiment dans ses oreilles. C'était plutôt directement dans sa tête. Le son était étrangement dérangeant. Impossible d'entendre des paroles construites. Surement parce qu'il n'y avait pas d'êtres capables de pensées construites ici, en dehors de Kiefer, qui ne la laisserait certainement pas entendre la plus petite de ses réflexions si facilement. En tout cas, elle percevait les pensées de tous les animaux qui trainaient dans le sous bois ou pas trop profond dans le sable. Peut-être même quelques poissons.

Un bruit plus violent que les autres lui transperça le crâne: un gros chien traversait la plage au grand galop. Là encore, impossible de comprendre ce qu'il pensait, mais le bruit était fort. Surement parce que l'animal était gros et (relativement) intelligent. Toujours est-il que lorsqu'elle l'entendit, la surprise et la douleur contractèrent brutalement tous ses muscles. Elle se redressa d'un coup et planta ses ongles dans le bras de Kiefer. Le chien disparut de son champ de vision et le volume diminua.

"Putain... Y a pas moyen de régler le volume?"

Le bourdonnement ayant repris un niveau accoustiquement acceptable, elle relacha le bras du génie, y laissant des marques assez profondes, qui laisseraient peut-être place à un joli bleu un peu plus tard. Mais bon tant pis. Elle était SURE qu'il aurait pu faire une transition un peu plus délicate. Elle s'assit en tailleur et remit la chemise à peu près en place sur ses épaules.

Concentrée, elle faisait quelques essais. Elle pouvait se concentrer sur une seule pensée. Elle entendait quand même les autres, mais pouvait à peu près les séparer les unes des autres. Après quelques essais sur des fourmis et un écureuil qui passait à toute vitesse parmi les arbres, elle essaya d'aller voir du côté de l'esprit de Kiefer. Apparemment, elle n'avait pas besoin de regarder la personne ou l'animal pour entrer dans son esprit.

Sans le regarder elle fit une tentative d'approche. Ca avait l'air faisable. Encore un peu. Encore. Fermement (mais certainement pas doucement), elle se vit reconduire à l'extérieur. Il y avait une sorte de mur infranchissable qui l'empêchait d'entrer. Pour une fois bonne perdante, elle releva les yeux et sourit.

"Ok, je n'essaierai pas plus aujourd'hui."

Ce bourdonnement permanent était quand même pénible... Elle était condamnée à être docile avec son génie pour qu'il lui explique comment couper le son. C'était forcément possible, sinon il serait devenu complètement dément depuis longtemps. Et encore ici il n'y avait même pas d'humains. La seule idée de se retrouver maintenant au beau milieu d'un marché ou d'une taverne la fit frissonner d'horreur.

Le génie regarda passer le chien, se demanda ce qu’un tel animal faisait ici, au milieu de nulle part. Il avait sondé le coin, pas de créatures plus évoluées tout près, alors il devait être seul. A moins que… sa réflexion qui n’était en fait pas bien importante fut interrompue par une subite douleur au bras. Il tira dessus, par réflexe, mais quelquechose le retenait. Alors qu’il suivait l’animal des yeux, Clotilde venait de lui planter ses ongles dans l’avant bras.

« Hey, non mais ça va pas ?! »

Il ne disait pas ça avec un ton inquiet pour elle, mais bien avec colère. De quel droit mettait elle sa main sur lui, surtout pour faire CA. Elle l’aurait caressé, il n’aurait pas dit non, mais il n’était pas un punching ball ! Heureusement, une fois l’animal passé, elle lacha.

« Laboure toi toute seule la prochaine fois ! »

Avec un air grognon, il se massa le bras. Il n’était pas à proprement parler douillet, mais il aimait bien se plaindre... Alors il n’allait pas se priver, si ça pouvait servir, on ne sait jamais. Puis soupirant, il analysa la situation.

Ca faisait tellement longtemps que Kiefer maîtrisait ce pouvoir mental, depuis toujours semblait-il, qu’il n’avait pas réellement conscience de ce que Clotilde pouvait être en train de subir. En plus le chien n’avait pas eu beaucoup d’intelligence, il se contentait de réclamer un bon gros os à ronger. La demoiselle arrivait elle déjà a discerner les paroles dans le brouhaha ? Ce serait très bon signe sur son évolution.

Au premier assaut mental de la jeune femme il hésita entre l’envoyer bouler hors de sa tête avec pertes et fracas, ou juste la reconduire, simplement, mais sûrement. Il était bien gentil de choisir la seconde solution, même après les ongles dans le bras, peut être parceque les réjouissances ne faisaient que commencer. Il adorait avoir le rôle du maître, pour une fois !

« Tu peux toujours essayer… Je ne compte pas baisser ma garde. »

Allez, il était temps de lui expliquer un peu qui était le prof ici.

« Bon, pour le bruit, il faudra que tu apprennes… C’est parfois long, ça dépendra de ton talent mental… Mais c’est en effet plus facile quand on naît avec. »

Il fit une pause, la laissant apprécier le bourdonnement…

« Si vraiment tu penses en mourir, je peux te servir de filtre… Mais ça ne marchera que si je suis à portée, et j’ai horreur d’être restreint dans mes déplacements. Je risque d’être désagréable. Alors il faudra être gentille et tolérante. »

Si la fierté de la jeune femme l’empêchait d’accepter, elle finirait par être tellement exténuée qu’elle n’aurait pas d’autre choix.

Clotilde haussa les épaules une fois de plus. Elle était fort peu apitoyée par le sort du maaaaalheureux génie, mais les marques sur son bras commençaient à prendre une jolie teinte violette. Elle y était peut-être allée un peu fort. Et encore, elle n'avait pas fait exprès. Si elle avait voulu se venger, il ne s'en serait pas tiré avec quelques hématomes. Elle jugea toutefois préférable de ne pas lui faire valoir cet argument à titre d'excuse.

"Désolée. On voit que c'est pas à toi que ça arrive."

Bon. D'après ce qu'il disait, le bruit pouvait effectivement s'atténuer. C'était plus que nécessaire. Elle avait tellement l'habitude d'être seule que ce perpétuel brouaha la gênait surement plus que la moyenne des gens.

Qu'il serve de filtre? La proposition était intéressante. Mais allait-elle supporter qu'il soit à côté d'elle en permanence? Non, certainement pas. Elle finirait par être désagréable, et il ne voudrait plus la protéger des pensées des autres. Il y avait une autre possibilité: qu'il serve de bouclier uniquement quand il était là. Le reste du temps, elle se débrouillerait seule.

"Je te pro... Non finalement non"

Elle prit conscience des faiblesses de l'idée avant même d'avoir du la formuler à haute voix. Si Kiefer lui offrait le silence, supporterait-elle de le voir s'éloigner, si ça voulait dire que les voix reprenaient? Ca allait probablement user ses nerfs rapidement.

Il fallait donc choisir entre tout ou rien. Et le choix était vite fait. C'était rien.

"C'est gentil, mais je me débrouillerai."

Etre gentille et tolérante ne marcherait pas longtemps, surtout si lui était désagréable. D'autant qu'il essaierait surement d'en profiter pour en rajouter une couche. Elle deviendrait folle encore plus vite qu'en laissant agir les voix. Et puis elle réussirait peut-être à apprivoiser sa faculté toute neuve. Apprivoiser Kiefer serait une aventure autrement plus hasardeuse.

"Bien entendu, il est hors de question que je quitte cet endroit relativement désert. Si on retourne en ville, je meurs d'une rupture d'anévrisme sur le champ. Donc je reste ici. Et inutile de préciser que tu restes avec moi"

Si Kiefer n'avait pas été Kiefer, et si Clotilde n'avait pas été elle-même, elle aurait très probablement réclamé un massage dans le dos pour se détendre. Malheureusement, il était un génie insupportable, et elle était beaucoup trop fière pour réclamer ce genre de choses, donc elle s'en passerait.

Elle fit une tentative pour se relever. Mais le bourdonnement perturbait son sens de l'équilibre, et elle retomba brutalement par terre, des étoiles dansant devant ses yeux.

"Kss"

Le génie haussa un sourcil, essayant de saisir la logique dans les réflexions de Clotilde. Oui ? Non ? Peut être ? Merde ? Et quoi d’autre ? Elle comptait se débrouiller ? Bien. Rester assis devenait difficile pour Kiefer, qui commençait à sentir les grains de sable s’incruster entre sa peau et le tissus épais de son pantalon… Sans compter les traces dans ses chaussures, qui s’insinuaient entre ses doigts de pieds… ==’

N’écoutant qu’à moitié il se leva et épousseta ses vêtements. Clotilde disait qu’elle comptait se débrouiller toute seule ? Bien, à sa guise. Peur de l’engagement peut être (XD), ou de devenir accroc au silence ? Dans un sens, elle avait raison, elle apprendrait plus vite si ça lui tapait sur les nerfs et son sommeil était en jeu.

« Pardon ? »

Comment ça il restait avec elle ? Pourquoi faire ? Lui tenir compagnie ?

« Attend, je ne comprends pas. Tu veux que je reste, mais tu refuses que je t’offre le silence ? Tu ne serais pas légèrement maso par hasard ? »

C’était prendre les mauvais côtés, et rejeter les bons, il y avait de quoi se poser des questions. Mademoiselle tentait de se relever et hop, elle retomba au sol. Ah oui, le cerveau n’était pas fait pour être autant sollicité. Trop d’infos en même temps, trop d’analyses à faire. Tant qu’elle ne saurait pas filtrer, elle serait bien handicapée. Et Kiefer ne se sentait pas de jouer les garde malade.

Il avait envie de la prendre par les épaules et de la remettre debout de lui-même, ça irait tellement plus vite. Le génie avança même les épaules, se penchant vers elle, lui occultant le soleil, mais il se ravisa. Une main posée sur sa cuisse, en appui et l’autre lui massant les tempes, le génie cherchait comment proposer une aide… qui se faisait rare chez lui, sans la toucher de son plein gré.

Solution facile. Il tendit sa main. Toujours en appui, il lui proposait ainsi un peu d’assistance. Ca leur permettrait au moins peut être un peu de bouger. Et ce sans la forcer au contact.

Petit bonus en plus, le génie comptait bien… lui faire voir ce qu’elle manquait. Sans que ce soit évidemment détectable, il mettait en action son plan. Au moindre contact entre leurs deux peaux, elle profiterait de son propre silence… Tentant, n’est ce pas ? Mais si elle lachait, rebonjour les bourdons. Ce n’était pas du tout fair play de sa part, surtout que ce n’était pas une capacité innée, il devait mettre ce transfert au contact en place. Mais au moins elle aurait un avant goût de la paix qu’elle refusait.

« Allez, laisse toi un peu faire. »

Le visage impassible, il attendait, se doutant qu’elle allait refuser son aide. C’était même une évidence. Elle était d’une fierté ! Mais dans ce cas là il n’avait de toute façon rien à perdre : elle ne tomberait pas dans le piège puéril et croirait qu’il avait juste eu l’envie d’être amical, pour une fois.

Clotilde observa la main tendue de Kiefer avec circonspection. Où était le piège? Un peu d'aide aurait bien sûr était la bienvenue. Mais elle se doutait que son cher génie ne faisait rien sans rien. Mieux valait décliner l'offre. C'était amusant. Elle qui d'habitude n'hésitait jamais à prendre des risques, elle craignait ce qui lui arriverait si elle acceptait cette assistance.

Le bourdonnement dans sa tête ne faiblissait pas, malgré ses efforts pour faire abstraction. Elle ferma les yeux et se concentra pour conserver l'équilibre qui la maintenait assise. Malheureusement, des études très sérieuses prouvent que fermer les yeux pour maintenir sa stabilité est tout bonnement inefficace. Une histoire d'oreille interne. A la seconde où elle se sentit basculer, elle décida qu'attraper cette main en apparence secourable était forcément préférable à tomber dans les pommes en plein soleil pour prendre une insolation qui vous renverrait au tapis derechef.

Sa main toucha celle de Kiefer. Et le bruit s'arrêta. Elle rouvrit les yeux, stupéfaite. Par curiosité, elle relacha sa prise. Le bruit reprit, et il paraissait encore plus fort et désagréable. Elle reposa ses doigts sur la paume du génie, et le bruit cessa.

*Oh non pas ça, par pitié...*

"Tss tss. Pas très honnête tout ça, très cher. J'apprécie très moyennement qu'on me pousse à la consommation comme ça"

Kiefer avait gagné, elle le savait. Ce silence était si agréable... Lorsqu'elle le touchait, le monde redevenait calme. Et si elle le lachait... C'était tout simplement inenvisageable. Elle refit un essai, pour voir. Décolla ses doigts. Et rattrapa la main du génie avant qu'elle ne s'en aille. Décidément, elle avait bel et bien perdu.

"Tu me paieras ça un jour ou l'autre, ne t'inquiète pas. Moi aussi j'ai une bonne mémoire."

Clotilde n'envisageait même pas la possibilité que le génie n'ait pas eu le choix de provoquer cette coupure de son ou non. Dans tous les cas, il savait surement ce qui allait se produire, et c'était précisément pour sa qu'il l'avait poussée au contact.

"Note bien que j'apprécie ton aide et ce silence. Mais je suis condamnée à rester en contact avec toi, et je ne saurais dire qui va craquer en premier."

Surement elle, en fait. Il pouvait la mener à la baguette. Il suffisait qu'il menace de refuser le contact, et elle ne pouvait que se plier à la volonté du génie. Ca allait être nerveusement dévastateur. Elle s'éloignerait pour la douche, surement, mais le silence était tellement bon qu'elle y reviendrait vite. Et comment dormir avec ce bruit permanent? La prochaine fois que quelqu'un se proposerait d'exaucer ses souhaits, elle le raccompagnerait dehors avec perte et fracas. Si toutefois il y avait une prochaine fois et qu'elle en virait pas folle avant.

Et voilà. Elle tombait dans le piège qui de toute façon était quasiment incontournable. Kiefer avait choisi le rôle de l’emmerdeur, il devait l’assumer. Et il comptait pousser le vice jusqu’à la rendre accro. Au fond, pourquoi faisait il ça ? Et bien en fait, il ne savait pas. Peut être parcequ’il aimait se sentir indispensable, un besoin de reconnaissance puéril qui pourrissait la vie à ses maîtres. Pourtant, avant Clotilde, les autres étaient bien contents des opportunités qu’il offrait pour tout lui pardonner, surtout ses ‘blagues’ du début de relation.

La jeune femme faisait des tests, essayant de voir ce qu’elle pouvait supporter. Et a chaque fois, la conclusion était cinglante : c’était trop dur de résister. Ca devait être ignoble, Kiefer ne l’enviait pas.

« Ce n’est qu’un argument marketing banal et dont personne ne se plaint. Et pourtant c’est partout… Et puis je n’ai fait que t’offrir le silence. »

Au fond, dans un sens… en cherchant bien… il avait raison. Ou tout du moins il en était persuadé.

Clotilde a écrit:

Tu me paieras ça un jour ou l'autre, ne t'inquiète pas. Moi aussi j'ai une bonne mémoire.

Il se contenta de hausser les épaules. Que risquait il ? De changer de propriétaire ? Elle ne pouvait pas le blesser ou tenter de l’endommager…

Clotilde a écrit:

Note bien que j'apprécie ton aide et ce silence. Mais je suis condamnée à rester en contact avec toi, et je ne saurais dire qui va craquer en premier.

« Vu comme ça… »

Oui, vu comme ça, c’était un problème. Sauf que Clotilde ne savait pas qu’il pouvait filtrer à distance, comme il l’avait proposé au début, et comme il avait compté le faire. Le contact, c’était une façon de l’avoir, mais ce n’était pas obligé.

Souriant, il dégagea les doigts de Clotilde, l’attrapant à son tour, puisqu’il posait sa main sur son épaule, instaurant la continuité du contact. Fredonnant d’un air entendu, il posa son autre main sur le front de la jeune femme, juste le bout de l’index en fait, et enleva celle qui tenait son épaule. Leur lien ? Environ 1cm carré de peau… et le voilà qui reculait, reculait… c’était puéril, mais ça le faisait marrer.

Argument marketing? Vu sous cet angle, évidemment... Ca demandait réflexion. Toujours est-il qu'elle ne se retrouvait pas quasiment collée à lui de son plein gré. Ou plutôt si. Dans l'absolu, elle aurait pu le lacher sans en mourir. En pratique, c'était autre chose. Son cerveau lui hurlait de ne surtout pas rompre le contact.

Kiefer lui lacha la main. Elle crispa les machoires. Finalement non, il la tenait par l'épaule. Il lacha son épaule pour poser un doigt sur le front de Clotilde. Lui devait trouver ça très amusant. Elle un peu moins. En fait ça n'était même pas drôle du tout. Surtout maintenant qu'il se reculait. La zone de contact diminuait dangereusement.

"Arrête c'est pas marrant. Si tu essayes de me tuer, dis-le tout de suite, que je sache à quoi m'en tenir avec toi."

Il n'allait probablement pas se détacher d'elle. Il voulait juste lui faire peur. Lui montrer que maintenant c'était lui le chef. C'est bon, elle avait compris, il pouvait arrêter ce jeu stupide, maintenant.

Elle recula la tête d'un coup et l'attrapa par le poignet. Le bruit explosa dans son crane. Cela dura moins d'une seconde. Juste le temps de réétablir le contact avec le génie. C'était décidément très pénible. Il fallait faire le nécessaire pour que ça ne se reproduise plus.

Sans lacher son poignet, elle se redressa pour pouvoir prendre appui sur ses pieds. Là elle bondit sur le génie et atterrit à genoux sur son torse. Ca devait faire relativement mal, en y réfléchissant bien, mais bon il l'avait cherché.

Réajustement de la chemise avec la main libre. Il allait falloir songer à se rhabiller correctement rapidement. Ceci fait, elle se pencha en avant pour appuyer sur son épaule et lui faire toucher le sol. Elle ne craignait pas de le blesser comme ça, il était suffisamment souple.

"Et n'essaye même pas de te plaindre. Je m'assure juste de pouvoir rester en contact."

Si elle appuyait plus, elle risquait quand même de lui éclater une cote ou deux. Elle ferait attention, voilà tout.

[pas le temps de faire plus u_u]

Clotilde n’avait pas l’air de trouver la chose amusante. Bah, il y avait de quoi. Mais Kiefer préférait ne pas lui laisser imaginer qu’il aurait pu avoir l’idée saugrenue d’éprouver de la pitié.

« Je ne cherche pas à te tuer, tu es amusante comme propriétaire. »

Voilà que la demoiselle se rebiffait. Elle ne supportait pas de ne pas mener sa barque possible, mais le ricanement qui allait sortir de sa bouche s’étrangla lorsqu’elle lui sauta dessus. Deux genoux venaient de lui heurter la poitrine, lui coupant le souffle.

Entraîné par le poids, le génie se sentit partir en arrière. Le sol s’approchait vite et il s’étala le dos dans le sable. Heureusement qu’ils n’étaient pas sur un sol dur, alors Kiefer n’eut pas trop mal. A son corps tout du moins, pas à son amour propre. De plus, Clotilde se complaisait à appuyer avec ses genoux sur ses côtes…

Tout s’était passé si vite, et surtout sans crier gare, que son cerveau prit une décision certes un peu étrange, mais instinctive. C’était tellement inhabituel pour le génie d’être traité de la sorte, qu’il agit sans prendre en compte tous les paramètres. D’habitude, on l’écoutait. D’habitude, on lui parlait avec déférence. D’habitude, on se comportait avec respect…

Son bras droit se releva soudainement, sans s’inquiéter en apparence de la pression qu’exerçait Clotilde dessus. Celle était perchée sur sa cage thoracique, ses bras posés sur les siens pour le retenir, mais elle pesait quoi ? 55 kilos toute mouillée ? Son poids n’avait pas d’importance, déjà la main droite du génie agrippait sa gorge et ils basculaient tous les deux sur le côté avant qu’il passe sur le dessus. Que faisait il ? Son visage affichait désormais une expression inquiétante, mâchoire contractée et sourcils froncés.

Puis aussi rapidement que tout ceci s’était passé, il ouvrit les yeux, il réalisait ce qu’il était en train de faire. L’expression de colère laissa la place à de l’effroi et d’étonnement, comme s’il avait soudain la notion des événements. Toujours assis sur la demoiselle, il enleva sa main de sa gorge, incrédule.

Kiefer ouvrit la bouche, tentant d’articuler quelquechose qui ne sortait pas. Clotilde n’en avait certainement pas conscience, mais il était en train d’enfreindre une règle sacrée, peut être la plus importante de son ordre : il s’attaquait ouvertement à son maître. Plusieurs fois il avait eu l’envie de le faire avec ses précédents possesseurs, mais jamais la situation n’avait éveillé les trefonds de son cerveau reptilien au point de lui faire perdre la boule. Pourquoi Clotilde le mettait dans cet état là ?

Le génie ne resta pas tétanisé longtemps. Le regard toujours aussi incrédule, il recula aussi vite que c’était possible, avec les gestes souples d’un chat, il se retrouvait loin de la jeune femme de nouveau, accroupi sur le sable, et la tête basse.

« … Pardon… »

Que faire d’autre à part s’excuser ? Et dieu sait que ça lui coûtait… Il fallait qu’il parte. C’était idiot, il n’imaginait pas rester une seconde de plus en sa compagnie ! Il voulait être seul, loin de ce visage qu’il sentait au fond de lui avoir encore envie d’écharper…

Le bourdonnement dans la tête de Clotilde avait dû éclater au moment où il avait rompu le contact. Bizarrement, il n’avait plus tellement envie de la tourmenter là… Silence. Il imposa le silence dans sa tête. Pour tout dire, le génie venait d’inverser le souhait. Il utilisait maintenant la première solution, celle qu’il avait rejeté quelques minutes auparavant par jeu. La voleuse entendrait les voix petit à petit, elle n’aurait pas tout d’un coup, comme il aurait dû le faire depuis le début si il n’avait pas voulu faire son débile.

Kiefer avait conscience du fait que rien de tout ça ne serait arrivé si il n’avait pas cette mentalité de merde. Clotilde n’aurait pas été à bout, et il ne serait pas en train de jouer avec sa place à ce moment là !

Préparant sa disparition, le génie venait aussi de se rendre compte que si il filait ainsi, il la laisserait en territoire inconnu, presque à poil. Normalement, il n’en aurait eu rien à fiche… Mais là il se devait de se rattraper. Il mit donc ses pouvoirs en action et fit disparaître la jeune femme, ses affaires, et sa chemise, qu’il lui léguait sans remords. Elle était transportée directement jusqu’à la chambre du chef des voleurs, pièce qu’il avait connu avec Yushiro. Elle y serait tranquille, et au silence malgré le monde.

Kiefer ne s’attarda pas plus et disparut à son tour. Il n’avait pas encore trop d’idée sur où aller alors il avait choisi un lieu au hasard. Ce serait la surprise, et ça lui changerait les idées. Enfin, espérons. Son petit écart de conduite était apparemment passé inaperçu, ou avait été jugé mineur, sinon il n’aurait pas pu faire tout ça. Pourvu que ça dure.

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